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(please follow) the golden path

Llittérature, films, séries, musique, etc.

une saison en enfer

Publié le 3 Octobre 2011 par F/.

De l'éditeur, 2eme Edition, on ne sait pas grand-chose (je n'ai pas cherché beaucoup). Du livre, un peu plus déjà : Le Sang du ciel a été publié une première fois par Gallimard en 1961. L'auteur, Piotr Rawicz, n'a pas de page wikipedia française ou américaine : seulement une polonaise. Il naît en 1919 en Ukraine et meurt en 1982. Entre ces deux pôles, il est torturé par la Gestapo, déporté à Auschwitz puis à Terezin, survit, émigre en France, écrit Le Sang du ciel, son seul roman, une comète noire, un chef-d'oeuvre absolu - il chronique pour Le Monde, se fait des amis (Elie Wiesel, Julio Cortazar, Eugene Ionesco, Emile Cioran, André Schwartz-Bart, Jerzy Kosinski) puis tire sa révérence. "De quoi meurt-on à soixante ans ?" demandait-il  à une amie de jeunesse. "Cancer ou suicide." Sa femme vient de mourir ; ils étaient très proches. Piotr Rawicz achète un pistolet dans une boutique près de la Bourse et se tire une balle dans la bouche. Le sang du ciel, lui, continue de battre aux tempes de l'Histoire. Sa rumeur est un fleuve coléreux, charriant les mots comme des rocs, mille étincelles à chaque page. Dans un café parisien de l'après-guerre, le narrateur raconte à l'auditeur (vous, moi, le monde sourd et avide), l'histoire d'un certain Boris D. aux confins du monde, au-delà de l'horreur. Le Sang du ciel n'est pas un livre de plus sur la persécution nazie : c'est un poème, un éveil rêvé, un hallucination traduite en voyage, une histoire que nul horizon ne viendra racheter. Dire "quelque chose de vrai sur l'insupportable", traduire l'incommunicable, voici l'enjeu, le jeu indépassable, tout en non-dits et renoncements, tout en circonvolutions mauvaises ; de loin en loin, des tableaux surgissent, sublimes et atroces, des faces hurlantes écrasées contre la vitre du réel. La langue, la texture même de la langue, au secours même de ce qu'elle ne peut plus dire - Le Sang du ciel est un pari unique. Il coûte 18€ : un peu moins que le De Vigan, un peu moins que le Foenkinos, et il ne figure pas dans l'inventaire de Beigbeder. Qu'attendez-vous ? Le vingtième siècle n'en finit plus de mourir mais ses fantômes magnifiques sont plus vivants que jamais, et ils ont besoin de nous.

 

http://www.szombat.org/ftp/kepek/uj_cikkek//rawicz.jpg

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A
<br /> et bien, ça t'a ému au tréfonds... du coup ça m'intéresse.<br /> <br /> <br />
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J
<br /> Convaincue. Chouette de se faire conseiller des bouquins...<br /> <br /> <br />
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M
<br /> Bonbon, très bien, c'est noté...<br /> <br /> <br />
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F
<br /> <br /> Vous m'en direz des nouvelles.<br /> <br /> <br /> <br />