Vu aujourd'hui La Vie d'Adèle : 750 heures de rushes et pas mal de travail non-déclaré, à ce qu'on a pu lire, pour un résultat qui me laisse tout de même très perplexe. Deux filles s'aiment, elles baisent, l'une merde, l'autre la plaque, c'est triste, ça fait mal, fin de l'histoire. Ne lésinant pas sur les poncifs (les gays et gay-friendly sont ouverts, ils aiment l'art, le bon vin, la vie, quoi ; les beaufs sont beaufs et le resteront ; la carte de France est bien dessinée, en somme), le cinéaste hésite sans cesse entre naturalisme vivifiant et étude de mœurs pataude, et occulte (soigneusement ?) la dimension politique de l'homosexualité, se contentant d'une scène de gay-pride dont, du coup, on ne comprend pas très bien l'utilité. C'est parfois plein de charme et de sensibilité, il y a quelques moments de grâce mais globalement, j'ai eu beaucoup de mal à m'intéresser à cette histoire d'amour somme toute bien banale. Dire que le film pourrait être réduit de moitié est idiot : ce serait un autre film. Trois heures, c'était audacieux, encore fallait-il avoir quelque chose à raconter sur l'homosexualité. D'une certaine façon, et par sa représentation caricaturale d'une homosexualité qui n'aurait pas à se colleter avec le monde, Kechiche tue son sujet. Il paraît que la BD est beaucoup plus subtile. Du coup, ça m'a donné envie de la lire.