Antichrist, donc. Formellement, Tarkowski rencontre Lynch, rien de moins, avec quelques gouttes d'horreur japonaise et de convulsions hurlantes suivies caméra au poing : l'hystérie érigée
en système. Pour le reste, il faudra laisser décanter longuement afin de décider si le film peut/doit se réduire à un indigeste brouet sado-catholique ou à une sidérante plongée eyes wide open dans
les entrailles d'Eros-Thanatos, avec une nette préférence, en ce qui me concerne, pour cette seconde option. Mort, pourriture, femme, feu, animaux, coupures, étoiles, arbres : l'oeuvre de Lars, en
tout cas, croule sous le poids de ses symboles, secrétés comme autant de déjections et jetés à la figure du spectateur sans le moindre égard pour ses habitudes et ses attentes de consommateur
tranquille. Bergman est là, et Trakl, et Freud bien sûr, mais un Freud ivre, rongé de l'intérieur, et hurlant poings serrés à la lune. Chaos reigns, grogne un renard à la fin d'un
chapitre. Celui qui n'entendra pas sa voix pour ce qu'elle est - l'imprécation souveraine d'un auteur en guerre contre lui-même - restera à jamais aux portes de ce théâtre d'ombres, grelottant,
blessé et seul.
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