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(please follow) the golden path

Llittérature, films, séries, musique, etc.

here comes the night time

Publié le 3 Novembre 2013 par F/.

Comme beaucoup de monde, j’ai découvert Arcade Fire durant l’automne 2004 avec Funeral. C’était l’époque où on pouvait encore faire attention à ce que disait Pitchfork et Pitchfork disait : 9.7/10, et tout le monde se taisait.

 

 

Le fait est que Funeral restera sans doute comme le meilleur album pop-rock des années 2000, avec Kid A peut-être, dans un genre assez opposé. C’était un disque intense et fiévreux, organique et follement lyrique – hanté, surtout, et qui tranchait tellement avec ce qu’on pouvait entendre à l’époque qu’il était difficile de ne pas l’accueillir avec gratitude. Depuis, et à l'instar de Radiohead, Arcade Fire est devenu un "grand" groupe - transcendant son simple statut de groupe indie, mais affichant des ventes encore bien inférieures, rassurez-vous, à celles de Lady Gaga -, assez populaire pour remplir des stades (que ceux qui s’en plaignent jettent un œil aux charts US et Europe et considèrent les alternatives) et assez malin, la plupart du temps, pour ne pas le faire, et se cantonnant, comme les cinq d'Oxford, à une guérilla marketing souvent irritante mais, concédons-le, diablement efficace.  

 

 

Musicalement, force est de reconnaître que les choses avaient assez peu évolué entre Funeral et Neon Bible, le second ressemblant par moments à un simple succédané du premier (Intervention et No cars go, par exemple, étant connus depuis longtemps des afficionados). The Suburbs, en 2010, avait vu le groupe élargir sa palette de façon spectaculaire, Sprawl II (Mountains Beyond Mountains), notamment, annonçant un avenir potentiellement plus groovy. Reflektor vient confirmer cette tendance.

 

 

Produit par James Murphy (tête pensante des défunts LCD Soudsystem, dont la perte nous laisse salement orphelins), le 4e album des Canadiens donne la part belle au rythme et à la basse, sur un fond toujours aussi sombre, ombreux, limite poisseux par endroits. Les influences world (samba, Haïti, etc.), surtout perceptibles sur Flashbulb Eyes et Heres comes the night time, ne doivent pas être exagérées, et certainement pas, comme on a pu le lire ici ou là, comparées aux échappées aventureuses de Talking Head. Arcade Fire a simplement troqué la rage innocente des débuts contre une approche plus réfléchie, quasi intellectualisée, de sa musique (la composante Brian Eno est bien présente sur les titres les plus lents). C’est assez normal, et forcément un peu regrettable, mais exiger d’un groupe par essence populaire (il n’y a qu’à voir Win Butler et les siens sur scène pour comprendre qu’ils ont moins l’ambition de changer la pop que de faire danser les gens, voire de les rendre heureux ) qu’il se suicide commercialement est un vœu assez puéril. Arcade Fire évolue, mais à son rythme, et l’aventure n’est certainement pas terminée. Cette réserve contextuelle mise à part, et considéré à l’aune de la production pop-rock actuelle, Reflektor plane très largement au-dessus de la mêlée. Rock et dansant, grave et taquin, il agace presque, par moments, par l’impression de facilité qu’il dégage. Avec les deux premiers singles, Joan of Arc, Normal Person et It’s never over (Oh Orpheus) devraient soulever des houles dantesques et joyeuses dans les salles de concert. Arcade Fire est-il le nouveau U2 ? Le simple chaînon manquant entre Coldplay et Radiohead - moins bêtement consensuel que le premier, plus gentiment accessible que le second ? Ou juste un groupe en pleine construction, qui ignore encore à quoi ressemblera la prochaine étape de son parcours ? Reflektor n'enfonce pas le clou de façon défintive mais nous laisse de nombreuses raisons d'espérer.

 

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